Depuis environ vingt ans, on pensait que la Lune avait probablement joué un rôle stabilisateur indispensable pour l’axe de la Terre, assurant un climat propre à l’évolution de la vie pendant des centaines de millions d’années. Il n’en serait rien, ce qui voudrait dire que les chances de trouver une vie sur une exoterre sont maintenant revues à la hausse.

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    En 1993, Jacques Laskar et ses collègues publiaient dans le journal Nature un article qui allait quelque peu refroidir des adeptes de Seti. Selon leurs calculs, en l'absence de la Lune, l'axe de la Terre (son inclinaison par rapport à son plan orbital) varierait de façon tellement forte et chaotique que les oscillations du climatclimat en résultant seraient peu favorables au développement de la vie. Des années plus tard, le chercheur trouvait même la présence du chaos au niveau de certaines orbites du Système solaire.

    Ce résultat était assez décourageant car on pouvait en déduire qu'une exoterre doit possèder un satellite de la taille de la Lune pour que la vie puisse y apparaître et surtout évoluer vers des formes complexes et intelligentes. La formation d'une telle planète double (une expression justifiée par le peu de différence de taille entre la Lune et la Terre en comparaison aux lunes des planètes ardentes) étant fortement improbable, voilà qui faisait chuter fortement l'un des paramètres de l'équation de Frank Drake.

    Mais aujourd'hui, un groupe de chercheurs vient de publier un nouvel article intitulé Obliquity variations of a moonless Earth, qui remet en question cette conclusion et qui devrait rassurer ceux qui pensent que Carl Sagan avait raison de croire qu'il serait un jour donné à l'humanité de rencontrer son équivalent dans la Voie lactéeVoie lactée.


    Le survol de la Lune par Kaguya avec les cratères Aristillus et Autolycos et enfin le site d'Apollo 15, proche de la crevasse Hadley et de la chaîne des Apennins. © Jaxa/NHK/YouTube

    L'axe de rotation de la Terre est aujourd'hui incliné de 23° environ par rapport à son orbite mais l'article de Jacques Laskar avait montré qu'en l'absence de la Lune, il pouvait varier chaotiquement entre 0° et 85 °. Toutefois, l'échelle de temps et la probabilité associées à ces variations n'étaient pas clairement établies. Dans l'article publié aujourd'hui par Jack Lissauer et ses collègues, les résultats de simulations numériquessimulations numériques conduites sur une période équivalente à 4 milliards d'années du Système solaire donnent maintenant une perspective différente.

    Une stabilité sur des centaines de millions d'années

    Tout d'abord, il semblerait que les variations restent comprises entre 10° et 50° ce qui, tout en n'étant pas négligeable, implique des changements de climat moins violents. Surtout, les chercheurs ont constaté que pendant des périodes aussi longues que 500 millions d'années, l'inclinaison de l'axe de la Terre sans Lune restait comprise entre 17° et 32° et même entre 20° et 25° pendant des centaines de millions d'années. Ils ont découvert aussi que l'amplitude de ces variations n'était pas la même selon que la Terre tournait sur elle-même dans le sens contraire, ou non, à celui de sa révolution autour du SoleilSoleil. Une rotation rétrograde est ainsi plus stable et il en serait fortement de même si la période de rotationpériode de rotation de la Terre était inférieure à 12 h. 

    Si donc l'Homme aurait peut-être pu apparaître sur Terre en l'absence de la Lune, on peut tout de même se demander comment sa science et sa technologie auraient pu se développer tant est vraie cette affirmation d'Henri PoincaréHenri Poincaré dans son ouvrage La valeur de la Science (chapitre VI ) lorsqu'il dit que ce qu'il veut montrer avant tout à son lecteur, « c'est à quel point l'astronomie a facilité l'œuvre des autres sciences, plus directement utiles, parce que c'est elle qui nous a fait une âme capable de comprendre la nature ».

    Sans la Lune, qu'aurait fait Newton ? Que serait devenue l'astronautiqueastronautique sans les rêves ayant abouti à Apollo et Kaguya ?